Le Cinéma de Raoul Ruiz

Lettre d'un cinéaste ou le Retour d'un amateur de bibliothèques

Lettre d'un cinéaste ou le Retour d'un amateur de bibliothèques de Raoul Ruiz
court métrage documentaire super 8, vidéo France (1983) 12min.
Date de sortie en France : 6 avril 1983, Antenne 2
Réalisé par :
Raoul Ruiz
Synopsis :
Fin 1982, Ruiz retourne au Chili pour la première fois depuis son départ en 1974, après le coup d'état de Pinochet. Il rencontre d'anciennes connaissances, retourne dans la maison de son enfance, tout semble être à sa place. Cependant, une chose manque...
Scénario :
Raoul Ruiz
Montage :
Mary Mora
Production :
Antenne 2, magazine Cinéma, cinémas de Michel Boujut
Directeur de la production :
Image :
René Guissard
Son :
Luis Gimel
Musique :
Jorge Arriagada

Note
lecinemaderaoulruiz.com
Pierre-Alexandre Nicaise

Lettre d'un cinéaste
est un poème dans lequel Ruiz, en quelques minutes, résume son histoire son cinéma et sa vision du Chili.

Il s'agit d'un faux documentaire raconté à la première personne et autobiographique qui nous éclaire sur le processus de création ruizien. C'est à dire sur l'inscription dans une fiction des éléments épars d'une réalité que le spectateur est appelé à co-définir dans le déroulement du film.

Rarement sans doute, la douleur (l'exil, la dictature) et la réponse à cette douleur (l'humour, la distance, le cinéma), ont suinté à ce point coexistantes, par tous les pores d'une image cinématographique.

L'utilisation de la voix off et d'une chanson populaire d'avant le coup d'état de 1973, l'usage du Super 8 rendent compte des temporalités contradictoires auxquelles le cinéaste doit faire face lors de ce retour au Chili.

L'alternance de scènes "intemporelles" (lorsque Raoul Ruiz revient voir sa maison d'enfance), avec des vues prises dans la rue, et des interviews d'anciennes connaissances toutes affectées par la situation sociale et politique, contribue à faire de ce film un poème superbe.

L'intrigue de "la couleur manquante", qui a disparu du paysage, de la couverture des livres, et même des images du film, procure à l'histoire toute sa saveur politique, et peut-être permet à Ruiz d'exercer son "privilège" d'exilé : voir ce que ceux qui sont restés ne voient plus.